Aujourd'hui, le 7 septembre 2004, nous avons occupé l'immeuble situé à
Marterey 23.
Cette bâtisse est vide depuis maintenant presque 6 ans et
elle représente parfaitement l'attitude des propriétaires
et des autorités face à la crise du logement.
Premier acte : 1997, l'Association de logement pour les
jeunes en formation (ALJF) bénéficie d'un contrat de prêt
à usage avant de devoir quitter les lieux en décembre 1998
pour laisser place a un projet qui, d'après le
propriétaire de l'époque, allait démarrer tout prochainement.
Ce projet n'a jamais vu le jour, mais ce dernier a
scrupuleusement endommagé l'intérieur de la maison pour
« dissuader les squatters de s'y installer »
(24 heures, 2 octobre 2002).
Deuxième acte : 2002, un nouveau projet est lancé par
le propriétaire. Il projette des rénovations afin d'aménager
six appartements de luxe. A ce moment, la crise du logement
bat déjà son plein avec des taux de vacances de moins
de 0,7 % et une pénurie de logements à bas ou moyen prix. Malgré
le fait que ce projet a été accepté avec enthousiasme par
la municipalité, celui-ci ne verra jamais le jour.
Troisième acte : ce bâtiment reste vide et est laissé à
l'abandon jusqu'à aujourd'hui.
Levée de rideau : nous investissons cette maison afin de
la faire revivre.
Nous sommes un collectif d'une dizaine de personnes.
Nous avons occupé cette maison avec l'intention de la
remettre en état et d'y habiter. Nous comptons aussi
aménager l'espace pour proposer des activités publiques
et ainsi faire profiter d'autres personnes de ce lieu
situé au sein d'un quartier du centre ville. Nous voulons
créer un espace de vie conforme à nos envies et nos choix
(vie en collectivité, espaces remodelés, aménagements
écologiques). Nous cherchons également une solution à notre
besoin de logement dans un climat de crise qui reste
catastrophique. Nous occupons car c'est la solution à un
besoin immédiat, et nous désirons trouver un arrangement
avec le propriétaire.
La liste des scandales liés à cette maison est longue :
des personnes, respectant un contrat de « confiance »,
parties de leur propre gré pour un projet inabouti ; la
destruction d'un espace habitable par son propre
propriétaire ; l'accord de la ville sur un projet
d'appartements de luxe et au final, une maison vide en
plein centre ville.
Parallélement les autorités répriment toute tentative
d'auto-organisation en recherche de solutions. Le nouveau
schéma est la séparation des pouvoirs, comprenez que l'ordre
d'expulsion est un ordre uniquement juridique. Or quand
un juge signe, l'exécutif politique a le choix d'envoyer
la police ou non. Les autorités ne sont pas neutres dans
ce grand jeu de Monopoly où la loi sert systématiquement
les propriétaires. Les questions sociales sont reléguées
au domaine pénal malgré une majorité de gauche.
Pendant ces deux derniers années, les maisons occupées à
Lausanne et environs deviennent des denrées rares. Une
expulsion suit une autre. Quelques exemples de ce que la
«justice» et les propriétaires entendent par « respect de
l'état de droit » face aux squatters:
- L'Oasis à Pully, rasé par la Coop pour agrandir le parking
du supermarché
- L'Union à Prilly, rasé et remplacé par un escalier
- La Cité, rasée pour faire un projet immobilier très
controversé dans le quartier
- Le Rôtillon (Le Puits et rue Centrale 34), rasé pour
faire des subventionnés dans un des quartiers les plus
pollués de la ville
- La Riposte à Malley, expulsée deux fois, rendue inhabitable (sanitaires
détruits), restée vide et totalement murée
- Le Facteur à Renens, rasé le jour même, actuellement
terrain vague.
Cette ville est de plus en plus aseptisée et vidée de lieux
de culture et de vie. Les vieux quartiers cèdent place
à des espaces stériles. Entre multiplex et duplex, la
« culture » et la « vie » ont leur prix. Toute alternative
non mercantile est écrasée.
Nous nous opposons à cette mise en scène tragique, et
comptons vivre et créer selon des principes que nous
estimons logique. L'habitat n'est pas une marchandise.
Les maisons sont à celles et ceux qui les font vivre.