Grenoble: Un remède à la crise du logement... la prison |
-----------------------------Le problème----------------------
La crise du logement à Grenoble :
un besoin aussi fondamental que le logement est de plus en plus
difficile à
satisfaire dans notre "pays riche"... En France, les loyers ont grimpé
de 50%
en 4 ans (1). Ils engloutissent à eux seuls le tiers voire la moitié d'un
smic. Les agences immobilières ont de telles exigences (cautions,
garants...)
qu'elles entretiennent une véritale discrimination sociale à l'accès au
logement privé. Parallèlement, il y a à Grenoble 10000 demandes de
logement
sociaux alors même qu'un bailleur social comme Actis laisse vide des
dizaines
d'appartements et que, dans toute l'Isère, on ne construit
actuellement pas
plus de 700 logements sociaux par an (2). Les autorités veulent faire de
Grenoble "la silicon valley française", une ville qui "rayonnera sur
le plan
européen"... c'est-à-dire attirer une population d'ingénieurs : de belles
perspectives pour la spéculation immobilière et pour une hausse
continue des
loyers.
-----------------------------Quelles solutions ?------------------
Squatter les maisons abandonnées qui, paradoxalement, sont relativement nombreuses à Grenoble ? Non. C'est illégal donc c'est mal. Des propriétaires aussi variés que la mairie PCF de Saint-Martin-d'Hères, la Metro, Actis, la Clinique Mutualiste et des privés, nous l'ont soigneusement rappelé ces derniers temps (expulsion des squats "CPA", "la Charade", "Golgoth-a-xxx", 17 rue du Drac, "la Loupiote", "la Flibustière", menaces sur les "400 Couverts"...). Mieux vaut une maison murée ou un terrain vague qu'un repaire de personnes politisées qui méprisent la loi et l'insertion sociale. Le tribunal de Grenoble l'a bien compris, même si ses méthodes sont un peu brutales : il n'hésite pas à juger des squats expulsables en plein hiver, et la préfecture exécute promptement ses décisions (le "CPA" expulsé un 3 janvier, les tentes des berges de l'Isère éradiquées au bulldozer la veille de la trêve hivernale, sans préavis...).
S'organiser collectivement et lutter pour l'accès au logement ? Non. C'est trop dangereux. Voyez les 7 personnes arrêtées le 21 janvier dernier lors d'un rassemblement devant la préfecture pour protester contre les expulsions. Elles seront jugées le 6 décembre prochain pour "organisation d'une manifestation illicite" et "participation à un attroupement délictueux"... Des chefs d'inculpation très rarement invoqués et visant directement à réprimer le droit de manifestation. Mieux vaut faire des pétitions.
S'attaquer aux racines du problème et lutter pour un véritable changement social ? Non. Le principe de propriété privée est la base de notre économie, le remettre en cause serait mauvais pour la croissance. Certains parlent encore de lutte des classes et de révolution, mais il faut savoir abandonner ce genre d'idées et évoluer avec son temps. De plus en plus les entrepreneurs français font du management participatif et sympa -- certes ils restent les chefs, ils exploitent toujours des gens et ils continuent à s'enrichir, mais ils y sont bien obligés, car ils sont soumis comme les autres aux lois du marché et à la concurrence impitoyable des mauvais entrepreneurs américains. De même pour les élus : ils n'ont pas d'autre intérêt que le bien commun, ils aiment le peuple et le peuple doit le leur rendre, en se montrant responsable et citoyen, plutôt que de râler comme une vulgaire populace. Les dirigeants et les possédants ne sont pas des "ennemis de classe", mais des composantes comme les autres de notre société démocratique. La société civile doit cesser de s'en méfier, doit collaborer avec eux pour construire un monde meilleur, et doit devenir une vraie force de proposition, polie, pragmatique, et surtout non-violente.
-----------------------------Le remède miracle--------------------
Faisons preuve de réalisme et d'ingéniosité. Où sont les crédits et les grands projets de société de nos jours, où est la tendance ? Elle est à la construction de nouvelles prisons : 30 sont prévues d'ici 2007 (3). Nul doute que l'Etat saura à terme désigner assez de nouveaux délinquants pour les remplir. Mais la crise du logement appelle un remède urgent, immédiat, même temporaire : implorons pour que Grenoble ait elle aussi sa nouvelle prison (Varces est déjà surpeuplée), ouvrons les nouvelles cellules ainsi construites et encore momentanément vides au marché du logement. Leur taille ne différera pas tant des habituelles chambres universitaires ou foyers de jeunes travailleurs. L'ambiance carcérale sera formatrice pour les jeunes locataires, prélude au modes de vie atomisés et normés de notre société, et bonne prévention de l'insécurité galopante. Un ambitieux projet de lutte contre le chômage, en concertation avec l'ANPE, pourrait par ailleurs être connecté à ces nouveaux logements : les loyers modérés payés par les habitants pourraient financer la création de nouveaux postes de gardiens de prison, dont la tâche serait de vérifier, avec le sourire, que les chômeurs logés dans la prison sortent bien, chaque jour, faire des recherches d'emploi.
----------La lutte des classes c'est du passé, la révolution c'est ringard. Soyez citoyens !------------
L'APUCAVH : Association Pour Un Capitalisme A Visage Humain
apucavh@altermonde.org
José Bové, de passage à Grenoble l'été dernier, a dit :
"j'aime bien l'APUCAVH. Adhérez-y."
L'APUCAVH compte organiser un temps fort, jeune et festif, pour faire
connaître des propositions citoyennes comme celle-ci. Rendez-vous le 15
octobre au parc Mistral pour un concert en plein air de Sinsemilia.
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Notes :
(1) Le Monde supplément Argent, 21/03/2004
(2) Livre blanc du logement en Isère, 2004
(3) L'envolée n°8
L'APUCAVH : Association Pour Un Capitalisme A Visage Humain